Bard (C.), Les usages politiques de l’histoire des femmes

pantheon 8mars

Il est justifié de placer cet examen des usages politiques de l’histoire des femmes sous le révélateur du « pouvoir central » car la période récente étudiée ici correspond à un interventionnisme étatique innovant dans le domaine des Droits des femmes. Avec Yvette Roudy, l’histoire des femmes – à travers une vision forcément sélective – accède à une reconnaissance officielle et devient un élément, sinon de réflexion, du moins de communication politique. Cette histoire spécifique s’y prête en effet [1], assumant volontiers une dimension engagée, justicière à l’égard des victimes des « silences de l’histoire [2] ». De son côté, le féminisme français, après l’effervescence radicale des années 1970, très hostile à la vie politique institutionnelle, se recompose et adopte une démarche plus réformiste [3] où l’expertise tient un grand rôle [4]. Ce processus d’institutionnalisation influence la « demande sociale » : les pouvoirs publics sont interpellés sur l’absence des femmes dans la symbolique de la Cité et sollicités pour soutenir des initiatives liées à l’histoire des femmes et à la reconnaissance officielle de leur rôle à travers commémorations et panthéonisation. D’une certaine manière, l’histoire des femmes va combler un déficit (structurel) de mémoire collective des femmes. Les usages politiques de l’histoire des femmes sont le produit des interactions du « féminisme d’Etat [5] » avec l’offre académique et la demande sociale [6]. L’Etat a accompagné cette évolution, de la connaissance à la reconnaissance.

1er temps : Yvette Roudy innove

En 1981, Yvette Roudy est nommée ministre des Droits de la femme : François Mitterrand choisit une socialiste loyale à son égard, membre depuis 1973 du comité directeur du PS où elle a organisé le secteur Formation. Elle est secrétaire nationale à l’Action féminine (depuis 1977) et travaille au sein de la commission des Droits de la femme au parlement européen [7]. Son engagement socialiste est inséparable de ses convictions féministes précoces, affûtées au sein du Mouvement démocratique féminin, auprès de Colette Audry et de Marie-Thérèse Eyquem, ainsi que dans la lecture et la traduction de féministes américaines comme Betty Friedan. Elle a lu Edith Thomas, chartiste, romancière, résistante et pionnière dans l’étude des femmes rebelles et révolutionnaires du XIXe siècle [8]. Son ouvrage, La Femme en marge, paru en 1975 chez Flammarion, avec une préface de François Mitterrand, est pour l’essentiel un livre d’histoire consacré à l’évocation d’ » une longue marche » et à une réflexion sur les « rendez-vous manqués » du féminisme et du socialisme. En 1978, Yvette Roudy termine un manuscrit sur Flora Tristan, socialiste et féministe. Le PS, cette année-là, publie une brochure, Féministes français, avec des textes de Condorcet, Flora Tristan, Paul Lafargue, Nelly Roussel, Hélène Brion, Léon Blum et Yvette Roudy. Le recueil est composé par Jean Rabaut, journaliste à l’ORTF, qui publie également en 1978 chez Stock son Histoire des féminismes français, dans laquelle il ironise sur les féministes bourgeoises. Bourgeoises contre socialistes, priorité de la lutte des classes, refus de l’autonomie du combat féministe : ces débats conflictuels dans les années 1970 ont déjà une longue histoire, comme le montrent les recherches d’un jeune Américain, Charles Sowerwine, dont la thèse, Les Femmes et le socialisme, est traduite et publiée aux Presses de la fondation nationale des sciences politiques en 1978. Cet ouvrage appuiera la pression féministe au sein du PS ; Yvette Roudy s’y réfèrera souvent.

L’enjeu est présent aussi du côté syndical. Le point de vue habituel du mouvement ouvrier prévaut dans Les Femmes et le travail du Moyen Âge à nos jours par Edmonde Charles-Roux, Gilette Ziegler, Marie Cerati, Jean Bruhat, Madeleine Guilbert, Christiane Gilles (La Courtille, 1975). Fouillée, l’étude de Marie-Hélène Zylberberg-Hocquard est plus favorable à la CGT qu’aux féministes « bourgeoises » [9]. Madeleine Rebérioux adopte ce point de vue. C’est une jeune sociologue, Margaret Maruani, qui lance les travaux interrogeant le sexisme ou du moins l’antiféminisme syndical (Les Syndicats à l’épreuve du féminisme, Syros, 1979). Chez ce dernier éditeur paraissent les ouvrages portant sur l’histoire du féminisme « autonome » : la précieuse collection de sources, « Mémoire des femmes », dirigée par Huguette Bouchardeau, auteure de Pas d’histoire, les femmes (1977), une synthèse déjà bien informée sur l’histoire contemporaine des femmes en France. Rappelons qu’Huguette Bouchardeau est universitaire, syndicaliste SGEN-CFDT, responsable des questions Femmes au sein du PSU dont elle va prendre la direction. Son parti, nourri par les « nouveaux mouvements sociaux », promeut une histoire des femmes féministe.

L’histoire contemporaine des femmes n’est pas – loin s’en faut – monopolisée par les historien(ne)s de métier. Elle intéresse des sociologues (Andrée Michel et Geneviève Texier, Evelyne Sullerot, Madeleine Guilbert…) et des théoriciennes du féminisme (Kate Millett, Sheila Rowbotham). Enfin, la redécouverte des sources théoriques du socialisme, chères à l’extrême gauche, diffuse la pensée d’Alexandra Kollontaï, Rosa Luxemburg, Clara Zetkin… Au fond, c’est plutôt la « deuxième gauche » qui se montre la plus réceptive aux ouvrages d’histoire en phase avec le féminisme du temps. Quant aux militantes du Mouvement de libération des femmes, elles sont trop jeunes encore pour infléchir les tendances historiographiques [10]. Il faut toutefois signaler la thèse (soutenue à l’Université de Paris VII) de Marie-Jo Bonnet, militante féministe et lesbienne de la première heure, qui publie en 1981 la première histoire des relations amoureuses entre les femmes, Un choix sans équivoque (Denoël Gonthier).

Résumons-nous : avant l’alternance de 1981, l’histoire des femmes est déjà présente dans la vie intellectuelle et la « communication » des forces de gauche. Sur le plan universitaire, malgré quelques séminaires spécialisés et une revue, Pénélope (1979), elle n’est pas encore en mesure d’exister de manière autonome et dépend de l’histoire de la famille ou du travail [11]. Au début des années 1980, les ressources disponibles susceptibles d’être mobilisées par Yvette Roudy ne sont donc pas très nombreuses. D’ailleurs, la conseillère culturelle de la ministre, Michelle Coquillat, est plus portée vers les arts et la littérature que vers les sciences humaines. Certes, l’Etat, désormais, soutient les études féministes, mais timidement : un seul poste d’histoire des femmes est créé (Toulouse Le Mirail, 1984). Les autres créations promises n’auront finalement pas lieu. L’action thématique programmée du CNRS sur les femmes permet cependant le financement de projets sur l’histoire des femmes. Pourtant, les historiennes professionnelles sont encore peu sollicitées. Michelle Perrot, avant la publication d’Une histoire des femmes est-elle possible ? (1984), n’est pas vraiment connue comme spécialiste. Yvette Roudy fait appel à Madeleine Rebérioux dont la notoriété d’intellectuelle de gauche ne doit rien à ce qu’elle peut faire, à l’Université de Paris VIII, sur l’histoire des femmes. Ce sont finalement deux romancières, Benoîte Groult et Dominique Desanti, qui occupent le front médiatique [12].

L’occasion annuelle de parler de l’histoire des femmes sous les lambris de la République sera fournie par la commémoration du 8 mars. La ministre des Droits de la femme innove en célébrant officiellement cette journée dès 1982. « Le 8 mars est devenu, depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir, l’occasion nationale de commémorer la lutte des femmes pour que cessent les inégalités et les discriminations dont elles sont victimes » [13] déclare Yvette Roudy en 1983. Imposer le 8 mars à l’Etat est à l’évidence un acte commémoratif. C’est une invitation à découvrir une histoire méconnue… mais parfois aussi manipulée. La ministre le sait, et prend ses distances avec le récit mythique des origines du 8 mars commémorant une grève imaginaire des ouvrières américaines en 1857 [14]. En insistant sur le rôle de Clara Zetkin dans la création de la journée internationale des femmes (lors de la 2e Conférence internationale des femmes socialistes à Copenhague), Yvette Roudy place l’événement nettement à gauche. Le parcours de celle qui deviendra l’un des leaders du KPD permet d’inclure la gauche communiste, de même que l’évocation du rôle des femmes russes le 8 mars 1917 [15].

« Il est apparu au nouveau gouvernement de la France qu’il convenait de marquer le changement, en renouant avec la tradition de lutte, que la création du ministère des Droits de la Femme a rendue plus actuelle que jamais », conclut Yvette Roudy le 8 mars 1982. Cette vision de gauche risque l’affadissement ou la dénaturation dans les médias : la « Journée internationale des luttes des femmes » tend à devenir une « Journée de la femme », façon « fête des mères ». Quant aux militantes du Mouvement de libération des femmes, elles se sentent inévitablement flouées par la mise en scène officielle de « leur » Journée et les valeurs implicites qu’elle promeut. Le 8 mars d’Etat devient en tout cas l’occasion, souvent unique dans l’année, de valoriser l’histoire des femmes par des expositions, des conférences, des émissions de timbre, des films documentaires, des brochures et des affiches du ministère, sans oublier les petites boîtes d’allumettes ornées de portraits de féministes.

Un procédé s’impose pour transmettre l’histoire des femmes « officielle » : la liste de dates ou de noms, souvent intitulée « La longue marche » [16] (de l’égalité, de l’émancipation). C’est sur ce procédé que nous insisterons, sans pouvoir dresser un tableau exhaustif de toutes les initiatives sur l’histoire des femmes. Il s’agit d’abord de rendre hommage – mot le plus utilisé – aux femmes, à « la Femme ». Chaque année, Yvette Roudy obtient un timbre : Clara Zetkin en 1982, Danielle Casanova en 1983, Flora Tristan en 1984, Pauline Kergomard en 1985, Louise Michel en 1986. Le retour de la droite au pouvoir met fin à cette série. La ministre assume pleinement un positionnement de gauche et ne cherche pas à rassembler autour de figures consensuelles. Lorsque le nombre de personnalités à honorer augmente, les féministes en bénéficient, comme dans les huit documentaires réalisés avec l’aide du ministère des Droits de la Femme par Jacques Merlinot et Henri-Pierre Vincent qui présentent des portraits de Berthie Albrecht (avec Danielle Mitterrand), Olympe de Gouges (Benoîte Groult), George Sand (Dominique Desanti), Flora Tristan (idem), Virginia Woolf (Viviane Forrester), Christine de Pisan (Claude Gauvard), Hubertine Auclert (Michelle Perrot) ainsi que de Simone de Beauvoir, la seule vivante (avec Delphine Seyrig, Anne Sugier et Anne Zélensky). En 1982, pour le premier 8 Mars officiel, soixante portraits géants de femmes « ayant marqué l’histoire du féminisme » sont présentés dans la gare St Lazare. Un procédé qui fera date : il renoue avec les galeries de femmes illustres et prend à contre-pied les tendances de l’historiographie savante – la « Nouvelle Histoire » – et les valeurs du féminisme radical (et du mouvement ouvrier) généralement hostiles à la personnalisation des luttes collectives.

La chronologie des droits des femmes est une formule qui plaît. Elle rend justice, en comblant les lacunes des chronologies « générales ». Certes, la liste de dates a l’inconvénient de masquer les régressions en suggérant un sens de l’histoire linéaire orienté vers des progrès constants. La chronologie « positive » le passé, et place automatiquement le temps présent dans une situation avantageuse après une sélection de faits déjà promus par la postérité. Or l’inarticulation entre le passé et le présent est pour notre sujet fondamentale : au service de quel présent utilise-t-on l’histoire des femmes ?

Une affiche du PS – « La longue marche » – éditée en 1991 montre les limites de la formule « sélection de dates et d’héroïnes ». Ténèbres avant la Révolution : une seule date antérieure à 1789, celle de La Cité des Dames de Christine de Pisan en 1389. Puis jusqu’au milieu du XXe siècle, succession de révolutionnaires, de féministes, et de philosophes plaidant pour l’égalité des sexes, de leaders socialistes. A partir de 1944, des dates correspondant à des acquis législatifs s’intercalent avec les héroïnes. La sélection sur-représente le féminisme intellectuel (11 publications mentionnées). Les femmes grévistes – l’un des rares collectifs évoqués – sont cantonnées dans un décor rétro [17]. La mixité est sauvée par cinq occurrences de noms d’hommes (John Stuart Mill, Bebel, Léon Blum, Mitterrand cité deux fois). Ces points d’appui historiques sont ceux de la culture féministe de gauche et reprennent la sélection faite par Yvette Roudy pour une affiche du PS de la fin des années 1970. L’année 1981 marque la rupture brutale du critère de sélection. Sans explication, on passe de la culture d’opposition à la culture du pouvoir. Adieu, rebelles et martyrs de la cause des femmes ! Honneur à (pour ne citer que les dernières) Mary Robinson présidente d’Irlande (1990), Pauline Bebe première femme rabbin en France et en Europe (1990), Ann Richards, gouverneur du Texas (1990) et Edith Cresson, première femme Premier ministre en France en 1991. Notons l’évitement de la féminisation des noms de métier (pourtant demandée en 1984 par la commission de terminologie nommée par Yvette Roudy et présidée par Benoîte Groult), mais surtout, soulignons l’incohérence des choix postérieurs à 1981 : la libération des femmes se résume-t-elle a l’accès de certaines à des postes de pouvoir ? L’histoire du temps présent n’a pas encore guidé la main des politiques. Nul(le) ne sait encore qui est la Flora Tristan de notre temps. Tel un lapsus, cette affiche montre surtout que « la greffe féministe n’a pas pris sur l’appareil socialiste » [18] (Yvette Roudy).

Quelle est la fonction de ces chronologies toujours réimprimées depuis vingt ans ? De leur didactisme un peu naïf, on ne semble pas se lasser. La formule a certainement le mérite d’apporter comme une preuve du déni des femmes du passé. Les femmes n’ont pas de mémoire collective spécifique [19] ; au moins essaie-t-on de leur donner une histoire. Avec des moyens qui restent dérisoires : une affiche par-ci, une brochure par-là, car les espoirs d’Yvette Roudy sont confrontés à la grande indifférence des « camarades ». Les jugements « à chaud » formulés par Jane Jenson et Mariette Sineau, chercheuses en science politique, sur les deux septennats de Mitterrand concluent à un nouveau rendez-vous manqué entre la gauche et les femmes [20]. Avec un plus grand recul, la nuance est tentante. Yvette Roudy a innové. Première ministre des Droits de la femme, elle a donné à l’histoire des femmes pour la première fois une reconnaissance officielle. Cette histoire sélective et passée par le filtre du marketing politique a ses limites, facilement repérables par l’initié(e). Ainsi, le rapport au nombre peut prêter à sourire : des 60 femmes-qui-ont-marqué-l’histoire-du-féminisme, on ira jusqu’aux « 2002 » femmes apportant leur soutien au candidat Jospin… Il n’est pas encore question – pas avant 1989 – de panthéoniser des femmes mais la méritocratie instituée par le « féminisme d’Etat » prépare discrètement la voie. Yvette Roudy est d’ailleurs aujourd’hui consciente de cette dérive quantitative : à défaut de féminisme, les politiques (de gauche comme de droite) féminisent, nominations et honneurs faisant office de politique d’égalité.

2e temps : le féminisme d’Etat recule, l’histoire des femmes avance

La séquence Roudy terminée, le « féminisme d’Etat » est réduit à une peau de chagrin. Les féministes perdent totalement l’écoute des politiques pendant une décennie, jusqu’en 1995 (la conférence mondiale sur les femmes de Pékin et la campagne pour la parité réveillent alors l’attention des politiques et des médias). La demande de reconnaissance du rôle historique des femmes, pourtant, se renforce. Tout s’emballe à partir de 1989. L’histoire des femmes est au rendez-vous du bicentenaire. Marie-France Brive, titulaire du seul poste d’histoire des femmes en France organise à Toulouse un important colloque sur Les femmes et la Révolution. La philosophe Geneviève Fraisse publie Muse de la raison pour comprendre le lien « entre la fondation de la démocratie et l’exclusion des femmes [21] ». La thèse de Dominique Godineau, dirigée par Michel Vovelle, sur les femmes du peuple à Paris pendant la Révolution, touche dans ce contexte favorable un large public [22]. Déjà connue comme historienne de la maternité (avec Yvonne Knibiehler), Catherine Marand-Fouquet publie La Femme au temps de la Révolution afin d’« essayer de comprendre comme femme, comme Française, comme historienne, pourquoi une Révolution si grande, qui a donné aux hommes l’égalité des droits, a fait si peu pour nous, les femmes [23] ». C’est ce paradoxe que plusieurs intellectuelles entreprennent d’analyser. La ré-évaluation de l’Ancien Régime accompagne le questionnement sur la Révolution et la « démocratie exclusive » (Geneviève Fraisse). En 1989, Eliane Viennot organise avec Danielle Haase Dubosc un colloque sur Femmes et pouvoirs sous l’Ancien Régime [24].

Malgré cette abondance de travaux cette fois aboutis – on n’est plus en 1981-1982 – l’Etat reste indifférent. Rien au niveau officiel, à part un timbre « Madame Roland » [25]. C’est alors qu’est formulée la première demande de panthéonisation. Catherine Marand-Fouquet en prend l’initiative, dans une lettre au Monde, le 1er septembre 1989, demandant qu’Olympe de Gouges [26] rejoigne les trois élus de l’année : Condorcet, Monge et l’abbé Grégoire. Puis, incitée à demander trois femmes pour trois hommes par Gisèle Halimi, elle lance la pétition pour Olympe de Gouges, Marie Curie et Berthie Albrecht [27]. Trop tard pour 1989, lui fait répondre François Mitterrand, qui se montre favorable aux deux dernières propositions. En revanche, Olympe de Gouges, trop « gourgandine », suscite de la méfiance, et même de la défiance : le temple de la République peut-il accueillir celle qui écrivait : « O mon pauvre sexe, tu n’as rien gagné à la révolution » ? Notons aussi que certaines féministes ne souhaitent pas du tout voir « leur » Olympe au Panthéon (Marie-France Brive et le groupe Simone de l’université de Toulouse Le Mirail).

Entre le bicentenaire et 1994 (cinquantenaire de l’ordonnance accordant aux femmes les mêmes droits politiques qu’aux hommes) et 1995 (anniversaire du premier vote des femmes), l’histoire des femmes continue à s’immiscer dans la vie politique. Elle est renforcée par le nombre de ses spécialistes, la transmission aux plus jeunes et le succès de l’Histoire des femmes en Occident (sous la direction de Michelle Perrot et Georges Duby, cinq volumes parus chez Plon en 1991-1992). La campagne naissante pour la parité s’appuie sur les « leçons » de l’histoire des femmes qu’Anne Le Gall, Françoise Gaspard et Claude Servan-Schreiber connaissent bien, comme le montre leur livre-manifeste : Au pouvoir citoyennes ! Liberté, égalité, parité (1992). Ces leçons tendent à relativiser l’écart habituellement fait entre la droite et la gauche, voire à l’annuler, lorsque l’égalité des sexes est en jeu. Justement, la campagne paritariste s’efforce de rassembler des femmes et des hommes de droite et de gauche et tente de transcender les clivages entre féministes. Elle y parvient assez bien. Voilà donc, associées à Françoise Gaspard (PS), Simone Veil (UDF) et Hélène Carrère d’Encausse (Académie française) qui demandent la panthéonisation de femmes, mais l’Elysée, sourd et muet, néglige d’envoyer un accusé de réception. En 1993, le bicentenaire de l’exécution d’Olympe de Gouges, rédactrice de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, provoque de multiples manifestations, en particulier devant le Panthéon, le 6 novembre. La mise à plat du passé républicain continue avec le colloque La Démocratie à la française ou les femmes indésirables [28] dont la maîtresse d’œuvre, Eliane Viennot, bataille aussi pour la parité. Simone Veil est devenue ministre de tutelle du Service du droit des femmes, mais du côté de l’Etat, rien de bouge. En 1994-1995, la droite au pouvoir rate une occasion de faire valoir le rôle du gaullisme tant elle est convaincue que l’ordonnance signée par le général le 21 avril 1944 est son œuvre à lui seul. Craint-elle un examen sérieux ? La thèse de William Guéraiche montre bien le déclin dramatique du pourcentage de femmes élues à partir de 1958 (jusqu’à 1,6 % !) [29]. Lorsque la petite phrase redoutée est prononcée – « De Gaulle a octroyé le droit de vote aux femmes » -, la riposte est prête à l’emploi : qu’est-ce qu’« octroyer » ? De Gaulle ne cache-t-il pas la forêt, l’Assemblée consultative d’Alger où le communiste Fernand Grenier a su triompher de l’antisuffragisme encore vivace ? Et la forêt ne cache-t-elle pas le continent noir des luttes féministes qui ont précédé l’avènement de l’égalité des droits politiques ? L’une des plus pertinentes interrogations porte certainement sur le caractère non-événementiel de l’accès des femmes à la citoyenneté [30]. C’est l’histoire qui, cinquante ans plus tard, « fabrique » un événement qui ne sembla pas avoir eu à l’époque une si grande importance. L’actualité de la parité provoque, en retour, une curiosité du public et des médias à l’égard de l’histoire politique des femmes.

Parallèlement, l’histoire des femmes dans la Résistance est, elle, liée à des enjeux de mémoire. L’analyse historienne des biais masculinistes qui excluent après-coup les femmes de la Résistance commence-t-elle à être entendue ? En tout cas, la présence d’une ou de plusieurs Résistantes au Panthéon est demandée. Mais c’est la consensuelle Marie Curie (avec son époux), que François Mitterrand panthéonise en avril 1995. L’illustre scientifique, deux fois Nobel, est aussi, la même année, la première femme représentée sur un billet de banque.

La cause des résistantes continue d’être défendue. Citons Lucie Aubrac, infatigable conférencière dans les établissements scolaires. Loin d’être figée dans des souvenirs ressassés, elle mêle de manière très originale le discours de l’actrice-témoin de l’histoire, l’art pédagogique de l’enseignante en histoire-géographie-instruction civique et le discours informé sur les derniers renouvellements de l’historiographie. Elle qui a inspiré le travail historique avec son témoignage, Ils partiront dans l’ivresse (1984), est à son tour influencée par la sensibilité féministe présente dans les nouvelles recherches [31]. En 1996, le thème des femmes est retenu pour le concours national de la Résistance et de la déportation. Il peut s’appuyer sur le premier numéro de la revue Clio. Histoire, femmes et sociétés, dirigé par Françoise Thébaud, sur « Résistance et libérations ».

A partir de 1995, et certainement contre Les Mots des femmes de Mona Ozouf, accusée par les féministes – dont bon nombre d’historiennes – d’idéaliser les relations entre les sexes en France [32], l’histoire de la domination masculine se développe (colloques sur l’antiféminisme à Angers entre 1996 et 1998 ; travaux sur l’histoire des femmes tondues, du viol, colloque sur « différences des sexes et justice pénale »)… Ces recherches menées dans un cadre universitaire renforcent l’actualité du « féminisme » et lui donnent une certaine légitimité [33]. De plus en plus, les spécialistes de l’histoire des femmes sont tenues pour expertes de l’analyse du présent dans les médias. En 1997, Geneviève Fraisse fait exploser la frontière en devenant déléguée interministérielle aux Droits des femmes dans le gouvernement Jospin [34]. Après une année éprouvante passée à réclamer des moyens d’action, elle acceptera la deuxième place sur la liste conduite par le PC aux élections européennes. « Je n’ai agi qu’en fonction de mon savoir d’intellectuelle spécifique [35] », explique-t-elle. Est-ce le déclin électoral du parti qui rend possible une interrogation novatrice sur son « sexisme » passé autant que sur ses expériences positives de défense des droits des femmes ? En 1998, il fonde une association de recherche historique, sous les auspices de Marie-Georges Buffet (ministre des Sports), Madeleine Vincent et Brigitte Dionnet, avec la participation d’un nombre important de spécialistes de l’histoire des femmes [36]. Si l’on sent s’affirmer l’expertise historienne des questions « femmes », notamment dans ce dernier exemple, on ne peut pour autant conclure que la prise en compte des demandes concernant l’histoire et la mémoire des femmes est plus fréquente dans le monde politique. La gauche détient un monopole… que la droite n’a pas l’air de lui envier !

Il est certes difficile d’attribuer une ligne culturelle et a fortiori une vision de l’histoire des femmes à la droite chiraquienne, incertaine de son identité et floue dans ses positions programmatiques. Les droites ont moins d’affinités que les gauches avec l’histoire sociale et des mouvements sociaux, ainsi qu’avec les spécialistes de cette histoire, presque toujours en harmonie avec leurs objets d’étude. En revanche, les hommages rendus aux grandes dames du passé, genre historiographique ancien, qui prolonge les hagiographies de saintes sont assez consensuels. De Daniel Bensaïd (n° 2 de la LCR) à Edouard Balladur [37], les « Jeanne d’Arc et moi » se succèdent plus révélateurs de l’ego politique de l’admirateur qu’attentifs à l’admirée. Mais le culte rendu à Jeanne d’Arc, en particulier par l’extrême droite, est ambigu pour notre propos car cette jeune sainte (1920) est une icône équivoque, pucelle plus que « femme », sublimée par sa mission divine et ses vertus « viriles ». Les biographies de femmes anticonformistes telles Natalie Clifford Barney, Alexandra David Néel, Liane de Pougy [38] révélées par un journaliste du Figaro, Jean Chalon, plaisent à tous les publics. Stimulé par l’atmosphère paritariste, le féminisme de droite peut se montrer sensible à la sous-estimation des mérites féminins [39]. Honorer la mémoire de certaines femmes est une chose, accepter la démarche de l’histoire des femmes ou l’analyse de la domination masculine en est une autre. Il y a pourtant, dans les travaux d’histoire des femmes cités, de quoi ressourcer le discours antirépublicain et la critique de l’individualisme des Lumières, en mettant en évidence la misogynie de la plupart des philosophes et des politiques qui s’en inspirent [40]. Mais la droite paraît avant tout indifférente à ce domaine d’étude.

On a cependant l’impression d’une certaine continuité de l’Etat : en 1993-1995, Simone Veil est une ministre bienveillante à l’égard des féministes, et, depuis plus de vingt ans, le Service des droits des femmes apporte une certaine stabilité. Il continue d’éditer des brochures donnant des chronologies, affinées pour les éditions successives et imprimées sur des supports de grande qualité. Deux crus exceptionnels sont à signaler : une brochure grand format, Sur les chemins de l’égalité. Repères pour une histoire des droits des femmes, diffusée en 1995 pour le cinquantenaire du premier vote des femmes (Simone Veil signe l’introduction) et une brochure plus complète de 56 pages très joliment illustrée et intitulée L’Egalité en marche. Dates clés. L’égalité entre les femmes et les hommes. Elle sera diffusée gratuitement en 2001 et 2002, puis vendue par la Documentation française. La sélection des dates et la rédaction des textes ont été confiés à une historienne spécialiste, Laurence Klejman, qui a soutenu en 1987 une thèse, avec Florence Rochefort, sous la direction de Michelle Perrot, sur le féminisme en France de 1868 à 1914. Le titre de l’ouvrage issu de leur thèse, L’Egalité en marche, est repris pour la communication du Service du droit des femmes. L’utilisation privilégiée de la chronologie se perpétue, depuis le début des années 1980. Cependant, le contenu, renouvelé, tient compte des avancées historiographiques et en particulier des thèses dirigées par Michelle Perrot à l’université de Paris VII. Ainsi les chronologies « officielles » parviennent-elles à « s’arracher [41] » à l’envahissante problématique des années 1970 sur les rapports classe/sexe et socialisme/féminisme. Les nouvelles recherches vont au contraire placer la république et la démocratie au cœur de leur problématique [42]. Elles vont mettre en lumière une histoire des féminismes infiniment plus diversifiée sur le plan politique, culturel, religieux, sociologique que les premières approches des années 1970 polarisées par le marxisme et le féminisme radical ne le laissaient penser. Un féminisme tellement diversifié qu’il en devient « irrécupérable ». Cette volonté d’aborder l’histoire en toute rigueur et si possible sans préjugés ne s’impose pas sans difficulté. Dans les années 1980, elle expose les historiennes du féminisme à la critique de certaines militantes pour qui l’exercice même de la thèse et la neutralité qu’implique la critique scientifique sont de très coupables trahisons. Les résultats des nouvelles recherches seront finalement utiles à l’argumentation en faveur des droits des femmes. Au niveau de l’Etat, l’usage de ces travaux est limité aux opérations de communication [43] et de formation car les demandes de chronologies sont fréquentes dans les centres de documentation et peuvent servir à informer les fonctionnaires en charge de politiques d’égalité. L’outil a aidé plus d’une déléguée régionale aux droits des femmes et plus d’un élu ou un(e) ministre à préparer un discours. L’histoire reste cependant une ressource marginale. Malgré l’intérêt que lui portent une déléguée régionale aux droits des femmes, Françoise Lelièvre, spécialiste de l’éducation des filles, et une chargée de mission départementale, Evelyne Morin-Routureau, qui organise des cycles de conférences au Mans qu’elle publie chez Autrement, il n’a jamais été question, pour un 8 mars, de valoriser l’histoire des femmes. Les politiques anticipant sur la demande des journalistes veulent « coller à l’actualité » et avoir un impact électoral [44].

Aux féministes revient la tâche de créer cette actualité. Les demandes de panthéonisation sont réitérées : Catherine Marand-Fouquet défend toujours Olympe de Gouges ; un comité concernant George Sand s’est formé en 2002. De plus en plus, des associations de femmes, informées par les historiennes, dénoncent l’hégémonie masculine des lieux de mémoire [45]. Dans plusieurs villes, elles ont compté le nombre de rues portant un nom de femme (autour de 2 %) et rebaptisé « sauvagement » certaines rues [46]. Rues, stades, établissements scolaires, maisons de quartier… les occasions sont multiples pour honorer la mémoire de femmes ; l’initiative locale va peut-être relayer l’Etat, trop timoré.

L’abondance de l’offre académique riche en colloques, parutions, revues, expositions, conférences, séminaires soutient directement et indirectement cette demande sociale de reconnaissance. Depuis 2000, trois créations complémentaires, subventionnées par le Service des droits des femmes : Mnémosyne – association pour la promotion de l’histoire des femmes et du genre ; l’association Archives du féminisme et la Société internationale d’étude des femmes de l’Ancien Régime (SIEFAR) ; et, à partir de 2001, le projet de musée d’histoire des femmes et du genre, associé à un cybermusée. En trente ans, l’essor de la production historique sur les femmes est extraordinaire (même en tenant compte de l’inflation générale des colloques et des publications). Un domaine nouveau de l’histoire s’est constitué, avec le soutien financier des instances officielles chargées des droits des femmes et le soutien moral des associations féminines et féministes. Il se développe aujourd’hui un véritable militantisme pour l’histoire des femmes, sous une forme associative et autour de plusieurs projets très collectifs, intermédiaires entre le monde politique et le monde universitaire. Si le mot « féminisme » ne soulevait pas en France tant de préventions et de malentendus, on pourrait voir là l’émergence d’un féminisme culturel original puisqu’il s’appuie désormais sur des professionnel(le)s adoubés par l’Université. Certes, on aura compris que l’histoire des femmes susceptible d’être utilisée politiquement ne représente qu’une partie des recherches : celles qui concernent directement l’émancipation des femmes, l’évolution de leurs droits, leur rapport au politique, certains aspects emblématiques de la « condition féminine » – travail, maternité. C’est, principalement l’histoire contemporaine qui est concernée ; une histoire nationale (mais non chauvine, vue son insistance sur le « retard français »).

Les ressources mobilisables par les politiques sont aujourd’hui nombreuses. Seront-elles utiles ? Et utilisées ? Pour l’heure, la méconnaissance de la plupart de nos hommes politiques reste grande, si l’on en croit un questionnaire sur l’histoire des femmes publié par Marie-Claire pour le 8 mars 1999. On peut être élu de la Nation et ne pas connaître la date du droit de vote des femmes. On peut aussi sortir de Sciences en ignorant tout des travaux sur le genre, que l’Europe s’efforce pourtant d’encourager depuis plusieurs années. Les conventions entre le Droit des femmes et l’Education nationale (1984, puis 2000) ne semblent pas donner beaucoup d’effets. On attend toujours la prise en compte des renouvellements de la recherche dans les manuels du Secondaire. Il n’y a pas, en France, de « mois de l’histoire des femmes » et de musée de l’histoire des femmes ; la seule bibliothèque spécialisée étouffe dans la mezzanine où la mairie de Paris l’a confinée. Les changements importants attendus par les spécialistes, les universitaires et les militantes tardent à venir.

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Vingt ans après, le temps d’Yvette Roudy reste un « âge d’or » du féminisme d’Etat. On en retiendra surtout la commémoration officielle du 8 mars et l’invitation à découvrir l’histoire de l’émancipation sociale et politique des femmes. Toujours actuelle puisque la mairie de Paris pour la journée internationale des femmes de 2002 n’a pas hésité à recycler l’exposition de 1982 : la formule des 60 portraits géants n’a rien perdu de sa séduction. De la gare St Lazare, où elle s’adressait sans distinction à la foule industrieuse, l’exposition est passée au Panthéon, club plus sélect où elle s’est arrêtée au niveau des grilles. La « longue marche » continue… Espérons que la crypte ne sera pas sa dernière étape !

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Légende de l’illustration : Sur les grilles du Panthéon, le 8 mars 2002, l’exposition « Les 60 femmes qui ont marqué l’histoire du féminisme ». (cliché : C. Bard)

Christine Bard
Les usages politiques de l’histoire des femmes
Université d’Angers / Institut universitaire de France

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Notes

[1] Cf. Françoise Thébaud, Ecrire l’histoire des femmes, Fontenay-aux-Roses, ENS éditions, 1998.

[2] Michelle Perrot, Les Femmes ou les silences de l’histoire, Flammarion, 1999.

[3] Cf. le dossier sur l’avenir politique du féminisme dans Cités, n° 9, 2002 (en particulier les articles de Françoise Gaspard et de Françoise Picq).

[4] Sandrine Dauphin, « Les associations de femmes et les politiques d’égalité en France : des liens ambigus avec les institutions », Pyramides, n° 6, septembre 2002.

[5] Défini par Martine Lévy comme « une idéologie visant l’imposition de normes d’égalité entre hommes et femmes par une action institutionnelle » (Le féminisme d’Etat en France 1965-1985 : vingt ans de prise en charge institutionnelle de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, thèse d’Etat, 1988, p. 220).

[6] Les médias et l’édition devraient, idéalement, se joindre à ce trio. On ne peut que souhaiter une recherche plus approfondie que celle-ci qui ne donne que quelques repères thématiques et chronologiques.

[7] Cf. Françoise Thébaud, « Promouvoir les droits des femmes : ambitions, difficultés et résultats », Serge Berstein, Pierre Milza, Jean-Louis Bianco dir., Les Années Mitterrand. Les années du changement (1981-1984), Perrin, 2001, pp. 567-600.

[8] Les Femmes de 1848 (PUF, 1948) ; Pauline Roland, socialisme et féminisme au XIXe siècle (Rivière, 1956) ; George Sand (Editions universitaires, 1960), Les « Pétroleuses » (Gallimard, 1963)…

[9] Féminisme et syndicalisme en France avant 1914, Anthropos, 1978.

[10] La sociologie « marxiste » et la psychanalyse inspirent davantage les militantes de cette génération que l’histoire.

[11] A noter par exemple la discrétion de la participation de l’histoire (Georges Duby et Michelle Perrot, entre autres) au colloque dirigé par Evelyne Sullerot, Le Fait féminin, Fayard, 1978.

[12] La liste de leurs publications est longue et diverse. Dominique Desanti a publié La Banquière des années folles : Marthe Hanau (Fayard, 1968) ; Flora Tristan : femme révoltée (Hachette Littératures) ; Flora Tristan : vie et œuvre mêlées ; Daniel ou le visage secret d’une comtesse romantique, Marie d’Agoult (Stock, 1980) ; Les Clés d’Elsa. Aragon-Triolet (Ramsay, 1983) ; La Femme au temps des Années folles (Stock 1984). Benoîte Groult a publié Le Féminisme au masculin (Denoël Gonthier, 1977).

[13] Communication du ministre des Droits de la femme au conseil des ministres du 9 mars 1983 (Fonds Roudy, 5 AF 89, Centre des Archives du Féminisme, Angers). Notons qu’Yvette Roudy a déposé ses archives dans un centre spécialisé sur l’histoire du féminisme.

[14] Ce récit mythique des origines a été véhiculé par le PC et la CGT à partir des années 1950 comme le montrent deux universitaires féministes, Françoise Picq et Liliane Kandel, dans un article : « Le mythe des origines, à propos de la journée internationale des femmes », La Revue d’en face, n° 12, automne 1982, mis en ligne sur le site bu.univ-angers.fr/ARCHFEM/8mars.htm.

[15] Discours d’Yvette Roudy pour le 8 mars 1982, CAF Angers (5 AF).

[16] Image déjà présente dans l’ouvrage qu’Yvette Roudy publie en 1975, La Femme en marge… op. cit.

[17] Il est question des ouvrières en 1869 (grève à Lyon) et en 1876 (manifestation à New York).

[18] Entretien avec l’auteure, 26 juin 2003.

[19] D’ailleurs, les hommes en ont-ils une ?

[20] Jane Jenson, Mariette Sineau, Mitterrand et les Françaises. Un rendez-vous manqué, Presses de sciences-po, 1995.

[21] Muse de la raison. La démocratie exclusive et la différence des sexes, Aix-en-Provence, Alinéa, 1989, 4e de couverture.

[22] Citoyennes tricoteuses, Aix-en-Provence, Alinéa, 1988.

[23] Stock / Laurence Pernoud, collection « La femme au temps de… », 1989, p. 10.

[24] Paru chez Rivages en 1991.

[25] Et non Olympe de Gouges, ou Théroigne de Méricourt… Si le choix de Madame Roland est décalé par rapport aux aspirations féministes de la fin du XXe siècle, il est en phase avec celles du XIXe : dans La Citoyenne, à l’occasion du premier centenaire de la Révolution, Maria Martin a défendu l’idée de la panthéonisation de « celle qui fut le type vivant de la douceur et de la candeur, le modèle de la citoyenne comme de l’épouse et de la mère […], morte pour la liberté » (cité par Catherine Marand-Fouquet, « Olympe de Gouges au Panthéon ou la tribu France et ses femmes », La Démocratie ‘à la française’ ou les femmes indésirables, Publications de l’Université de Paris 7 / Denis Diderot, 1996, p. 270). Les informations sur la campagne de panthéonisation proviennent de cet article.

[26] Connue grâce aux travaux d’Olivier Blanc, par une première biographie parue chez Syros en 1981.

[27] Mieux connue après la sortie de la biographie faite par sa fille, Mireille Albrecht, Berty, Robert Laffont, 1986.

[28] Colloque qui a eu lieu à Paris sous l’égide du CEDREF à Jussieu et à l’Assemblée nationale, un choix qui n’est pas neutre compte tenu du sujet abordé et a bénéficié du soutien du Service des droits des femmes.

[29] Thèse soutenue à l’Université de Toulouse le Mirail en 1992, publiée sous le titre Les Femmes et la République. Essai sur la répartition du pouvoir de 1943 à 1979, L’Atelier, 1999.

[30] Cf. Bruno Denoyelle, « Des corps en élections ; Au rebours des universaux de la citoyenneté : les premiers votes des femmes (1945-1946) », Genèses, n° 31, juin 1998, pp. 76-98.

[31] Cf. Lucie Aubrac, Cette exigeante liberté (entretiens avec Corinne Bouchoux), L’Archipel, 1997.

[32] Sur cette polémique, voir « Femmes : une singularité française ? », Le Débat, n° 87, novembre-décembre 1995.

[33] Christine Bard, « Jalons pour une histoire des études féministes en France (1970-2002) », Nouvelles Questions Féministes, vol. 22, n° 1, 2003, pp. 14-30.

[34] La rumeur a couru au sein du PS, avant la nomination de Geneviève Fraisse, que Michelle Perrot était pressentie pour ce poste, mais la demande ne lui a pas été faite (entretien avec Michelle Perrot, 26 juin 2003).

[35] Roselyne Bachelot, Geneviève Fraisse, Deux femmes au royaume des hommes, Hachette, 1999, p. 230.

[36] Cette association a organisé un colloque à l’Assemblée nationale (Femmes et communistes, histoire mouvementée, histoire en mouvement, Paris, Association de recherche « Femmes et communistes : jalons pour une histoire », 2002). La CGT s’engage elle aussi dans une réflexion sur l’histoire des femmes et du syndicalisme (colloque de 1999).

[37] Daniel Bensaïd, Jeanne de guerre lasse : chronique de ce temps, Gallimard, 1991 et Edouard Balladur, Jeanne d’Arc et la France. Le mythe du sauveur, Fayard, 2003.

[38] Portrait d’une séductrice (Natalie Clifford Barney), Stock, 1976 ; Le lumineux destin d’Alexandra David-Néel, Perrin, 1987 et Liane de Pougy. Courtisane, princesse et sainte, Flammarion, 1994.

[39] Voir par exemple, la reconstitution, par Paulette Laubie, ancienne présidente du Conseil national des femmes françaises, de l’Association des femmes décorées de la Légion d’honneur en 2001, après qu’elle eut découvert sa brève existence de 1938 à 1939 dans une thèse d’histoire (Les Filles de Marianne).

[40] Cf. par exemple, Xavier Martin, L’homme des droits de l’homme et sa compagne (1750-1850) Sur le quotient intellectuel et affectif du « bon sauvage », Bouère, Dominique Martin Morin, 2001.

[41] C’est le mot employé par Florence Rochefort, historienne du féminisme, CNRS (entretien avec l’auteure, 25 juin 2003).

[42] Même pour une historienne comme Michèle Riot-Sarcey qui marque cependant sa différence, en s’opposant – comme la plupart des féministes d’extrême gauche – à la parité, et en contestant la dénomination « histoire des femmes » (Cf. sa thèse, La Démocratie à l’épreuve des femmes. Trois figures critiques du pouvoir 1830-1848, Albin Michel, 1994).

[43] La constance dans l’utilisation des outils mis au point du temps d’Yvette Roudy est sans doute due en partie à la longévité en poste de la personne travaillant à la communication du Service du droit des femmes, recrutée en 1981 (entretien avec Michèle Cabaud, Service du Droit des femmes, novembre 2002).

[44] Entretien avec une agente du Service du Droit des femmes, 25 juin 2003.

[45] Ce monument historiographique est lui aussi presque exclusivement occupé par des hommes.

[46] Ces initiatives ont été encouragées et relatées en 1999-2000 par le Réseau Séverine, lancé par la journaliste féministe Florence Montreynaud, auteure de l’utile Encyclopédie des femmes au XXe siècle (Fonds Montreynaud, CAF d’Angers).